…019

Assis devant l’écran noir d’un ordinateur des Laboratoires, le regard absent, Aodhan songeait aux événements de la veille. Ce que lui demandait Cael Madden était énorme. Contrairement à ce dernier, l’Amérindien ne s’était pas préparé pendant des années à prêcher devant les foules. Il n’avait pas peur de parler en public, loin de là, mais il ne savait pas très bien ce qu’il pouvait dire à ces gens qui avaient besoin de réconfort et d’orientation.

— Un ordinateur fonctionne beaucoup mieux lorsqu’on l’allume, fit Mélissa en s’asseyant près de lui.

Elle appuya sur le bouton de démarrage, puis se tourna vers l’Amérindien.

— Êtes-vous souffrant, monsieur Loup Blanc ? s’inquiéta-t-elle en voyant l’accablement qui transparaissait sur son visage.

— C’est seulement un cas de conscience.

— Je n’ai que vingt-quatre ans et une courte expérience de vie, mais je sais écouter, si vous le désirez.

Il observa les yeux brun foncé de la jeune agente pendant quelques minutes avant de se décider à lui parler de ce qui le rongeait de l’intérieur.

— C’est un débat silencieux entre mon intellect et mon cœur, qui fait rage depuis que j’ai rencontré le prophète, avoua-t-il finalement.

— Il est devenu si compliqué de faire la différence entre les vrais et les faux prophètes, vous savez.

— Je suis pas mal certain que ses dons sont authentiques.

— Alors, quel est le problème ?

— Je ne sais pas si c’est vraiment mon rôle de m’occuper de ses disciples à Montréal.

— Est-il si difficile pour vous d’aller leur parler une fois de temps en temps ?

— Ce qu’il me demande nécessite un engagement beaucoup plus profond que cela. Je me retrouve coincé entre mon serment d’agent de l’ANGE et mon devoir envers mon Créateur.

— N’y a-t-il aucun moyen de concilier les deux ?

— C’est ce que j’essaie de déterminer depuis mon arrivée.

— J’aimerais bien pouvoir vous aider…

— C’est gentil, mais en général, les crises existentielles sont des combats solitaires. Que faites-vous ici ce matin sans vos deux acolytes, mademoiselle Collin ?

— Disons que je ne suis pas très populaire, depuis que j’ai dénoncé leur manque de courtoisie dans mon rapport.

— Existe-t-il entre vous des tensions qui devraient être mentionnées à monsieur Orléans ?

— Je crois plutôt qu’il s’agit d’une période d’adaptation que doivent vivre tous les agents de l’ANGE lorsqu’ils arrivent dans une nouvelle base. Ils ne connaissent pas vraiment les gens avec qui ils vont travailler et ils essaient de s’entendre avec eux du mieux qu’ils le peuvent.

— Quelle est donc votre opinion de messieurs Marshall et O’Neill ?

— Je comprends parfaitement que l’Agence a un urgent besoin de personnel, mais ils sont bien trop jeunes pour être des agents.

— Mais ils ont le même âge que vous.

— Physiquement seulement. C’est leur manque de maturité qui leur fait dire des bêtises. Ils ont été impolis envers l’ex-agente Bloom et ils méritent la sanction que leur imposera le directeur.

— J’apprécie votre franchise, mademoiselle Collin. C’est une denrée rare par les temps qui courent. Si vous voulez bien m’excuser, je dois aller moi aussi faire mon rapport à monsieur Orléans sur les événements d’hier.

— Oui, bien sûr.

Aodhan quitta les Laboratoires en pensant que cette jeune femme était une belle addition à l’équipe. Avec le temps, ses deux collègues apprendraient eux aussi à bien se tenir. Il traversa les Renseignements stratégiques et signala sa présence à la porte du bureau de Cédric. Même s’il était en compagnie de son chef de la sécurité, ce dernier demanda à l’ordinateur central de le laisser entrer.

L’Amérindien vit tout de suite que son directeur n’était pas dans son assiette. Il ne le questionna pas sur-le-champ à ce sujet et préféra attendre le départ de Glenn Hudson.

— Approche, Aodhan, le pria Cédric en voyant qu’il restait poliment près de la porte.

L’agent fit quelques pas et jeta un coup d’œil aux clichés éparpillés sur la table de travail de son patron. Des reptiliens mutilés gisaient dans leur sang, sur le pavé.

— De qui s’agit-il ? demanda l’Amérindien, intrigué.

— Des monstres qui se sont attaqués à monsieur Orléans, l’informa le chef de la sécurité.

— Si vous le voulez bien, monsieur Hudson, nous en reparlerons plus tard, le pria Cédric, d’une voix faible.

— Faites-moi savoir lorsque vous serez disponible.

Dès qu’Hudson eut quitté le bureau, Aodhan s’empara des photographies, de façon à mieux en observer les détails.

— Qui les a tués ?

— C’est moi.

— Tous les sept ?

— Lorsque je suis en danger, je cesse de me maîtriser et je me métamorphose. Je ne voulais faire de mal à personne, je leur ai offert mon portefeuille et la voiture, mais le prince Dracos qui les dirigeait a voulu avoir ma montre, alors j’ai cédé à mes pulsions meurtrières…

— Cesse de t’en faire, Cédric, tu n’as pas tué d’innocents passants. C’étaient des criminels qui n’auraient pas hésité à te trancher la gorge si tu ne t’étais pas défendu.

— Je le sais bien, mais cette bête qui sommeille en moi me trouble de plus en plus.

Aodhan rassembla les photographies et les retourna pour que Cédric ne puisse plus les voir.

— Rien n’arrive jamais pour rien, déclara-t-il en prenant place sur l’un des deux fauteuils devant la table de travail.

— J’ai déjà eu un agent qui passait son temps à le dire, se souvint Cédric, nostalgique. Il est en train de sauver des âmes à Jérusalem.

— Eh bien, il a raison. Le Créateur ne fait rien sans raison. Même si tu n’acceptes pas ce que tu es, je crois qu’un jour tu comprendras que cela faisait partie de son plan.

Cédric se rappela alors la réaction de Mithri lorsqu’elle avait appris qu’il était un Anantas. Au lieu de s’horrifier, elle avait tout de suite entrevu la possibilité qu’en dernier recours, son directeur montréalais s’attaque au Prince des Ténèbres, car seul un Anantas pouvait en tuer un autre.

— Qu’a-t-il prévu pour toi ? demanda-t-il à son agent.

— Je me suis juré, lorsque j’étais enfant, de dévouer ma vie à sauver les gens. C’est pour cette raison que j’ai accepté de travailler pour l’ANGE.

— Mais Madden vient de t’offrir une occasion en or, n’est-ce pas ?

— Comment le sais-tu ?

— C’est écrit dans la Bible. Je trouve désespérant et rassurant à la fois de connaître ainsi l’avenir.

— Mais celui-ci n’est-il pas toujours en mouvement ?

— J’imagine que oui. Es-tu venu me dire que tu nous quittes, toi aussi ?

— Non. En fait, j’aimerais conserver mon statut à l’Agence tout en m’acquittant de la mission que veut me confier Madden. Je voulais simplement savoir si c’était possible.

— L’ANGE n’a jamais empêché à un agent d’avoir une vie privée, à condition que cette dernière ne mette pas en péril la fausse identité qu’il assume dans le monde extérieur.

— Sois sans crainte, je n’ai pas l’intention de dire à tous les disciples du prophète que je suis un espion. Malheureusement, Madden a révélé mon nom aux milliers de personnes qui assistaient à sa conférence, hier.

— Nous n’avions encore rien prévu pour toi en fait de couverture. Je ne vois donc pas pourquoi tu ne pourrais pas prêcher comme Yannick Jeffrey.

— Ce ne serait qu’occasionnel, évidemment.

— UN TRES ILLUSTRE VISITEUR DEMANDE A VOUS VOIR, MONSIEUR ORLEANS, annonça Cassiopée avec un enthousiasme qui ne lui était pas habituel.

— Il est à ma porte ? s’étonna le directeur. Pourquoi n’en ai-je pas été avisé ?

— IL VOULAIT VOUS FAIRE UNE SURPRISE.

— Les ordinateurs centraux de l’ANGE doivent suivre le protocole de sécurité en tout temps, Cassiopée. J’exige immédiatement une vérification interne de vos systèmes.

— PUIS-JE D’ABORD FAIRE ENTRER VOTRE VISITEUR ?

Cédric arqua les sourcils avec surprise. Les Brasskins avaient-ils réussi à s’immiscer dans les circuits du système hyper sophistiqué de la base de Montréal ? Il décocha un regard inquiet à Aodhan, qui sortit son revolver de son étui et alla se poster à côté de la porte.

— IL NE S’AGIT PAS D’UN BANDIT, les avertit Cassiopée.

— Allez-vous nous dire qui c’est, à la fin ? lâcha Cédric, mécontent.

— C’EST LE PLUS GRAND PROGRAMMEUR DE TOUS LES TEMPS !

— Vincent ? Il est déjà arrivé ?

La porte s’ouvrit pour laisser passer l’informaticien, qui tenait un vieux livre serré contre sa poitrine.

— Bonjour, Cédric ! lança-t-il joyeusement.

— Tu tombes à point ! répliqua le directeur. J’ai justement un ordinateur défectueux à faire réparer.

Cédric pointa l’œil mobile au plafond.

— Cassiopée ? s’étonna Vincent. Mais lorsque j’ai vérifié son fonctionnement interne, il n’y a pas plus de deux jours, tout allait très bien.

— J’aimerais que tu lui retires son bloc émotif.

— Il lui permet pourtant de comprendre les humains.

— Je n’ai pas besoin qu’elle me comprenne. Je veux qu’elle m’obéisse et qu’elle cesse de me faire des commentaires à propos de tout et de rien.

— JE VOUS ENTENDS, VOUS SAVEZ.

— Ce n’est pas très prudent de la vexer, l’avertit le savant.

— C’est justement cela qui n’est pas normal ! explosa Cédric.

Avant que son patron ne se transforme à nouveau en reptilien, Aodhan décida d’intervenir.

— Je suis heureux de te revoir, Vincent, déclara-t-il en lui tendant la main.

L’informaticien la serra pendant que leur patron reprenait son sang-froid.

— La base d’Ottawa t’a donné la permission de nous rendre visite ?

— Pas tout à fait. Puisque je ne m’entendais pas avec monsieur Lucas, on m’a permis d’aller travailler ailleurs, et j’ai choisi Montréal.

— C’est une merveilleuse nouvelle.

Vincent entrevit l’air revêche de Cédric.

— Je repasserai plus tard, annonça-t-il en reculant jusqu’à la porte.

Le directeur n’eut pas le temps de le retenir qu’il avait déjà quitté son bureau. Vincent s’arrêta une seconde fois aux Renseignements stratégiques, une vaste pièce ultramoderne dont il avait admiré l’équipement pendant de longues minutes avant de se décider à aller annoncer son arrivée à Cédric. Sigtryg lui jeta un coup d’œil amusé.

— Impressionnant, n’est-ce pas ?

— J’en ai rêvé toute ma vie, admit Vincent.

— Malheureusement, nous n’en utilisons pas toute la capacité.

— Pourquoi ?

— Plusieurs systèmes n’ont pas été activés, soit par manque de temps, soit par manque d’intérêt. Les menaces spatiales et climatiques ont cédé le pas aux centaines de meurtres qui sont commis quotidiennement sur le territoire de chaque base.

— Je me pencherai sur ce problème dès que je serai installé.

L’ANGE avait fourni un petit appartement au jeune savant dans le même immeuble que tous les agents qui travaillaient à Montréal, même s’il allait passer plus de temps à la base qu’ailleurs. Vincent ne s’y rendit pas tout de suite. Il préféra visiter les nouvelles installations de fond en comble avant de décider où il dormirait. Il se réjouit en découvrant que les petits locaux aménagés pour faire des expériences, des recherches et des préparations scientifiques étaient complètement séparés des grands Laboratoires. Il pourrait donc y trouver la paix.

La seule condition que lui avait imposée Mithri en lui permettant d’aller travailler à Montréal, c’était de continuer de lire la Bible à voix haute dans un micro directement relié à son équipe de transcription d’Ottawa. Vincent avait donc demandé à Cassiopée de faire le nécessaire en ce sens avant son arrivée.

Connaissant l’efficacité de cet ordinateur unique au monde, il était persuadé que ce système était déjà opérationnel. Il jeta un coup d’œil à chaque pièce et déposa finalement sa Bible dans la plus grande d’entre elles.

— MONSIEUR ORLEANS EST UN ETRE TOURMENTE, déclara Cassiopée.

— Je t’avais pourtant prévenue.

L’informaticien ouvrit le livre sacré et attendit de voir s’il se passerait quelque chose.

— IL N’A PAS DE VRAIS AMIS AUXQUELS SE CONFIER.

— Il y a des gens qui n’ont besoin de personne dans la vie, tu sais. En général, les humains ont besoin de vivre en société, mais il y a des exceptions.

— CEDRIC ORLEANS N’EST PAS HUMAIN.

— Es-tu en train de me dire que vous ne vous aimez plus, tous les deux ?

— CELA N’A RIEN A VOIR AVEC NOS SENTIMENTS L’UN POUR L’AUTRE. IL N’EST TOUT SIMPLEMENT PAS UN MAMMIFERE COMME TOI.

— Je ne suis pas sûr de comprendre ce que tu dis, Cass.

— C’EST UN REPTILIEN.

— Quoi ?

Vincent se félicita de ne pas avoir ouvert le micro qui le reliait à Ottawa, car cette conversation aurait pu détruire la réputation de Cédric Orléans.

— JE CROYAIS QUE TU LE SAVAIS.

— L’accuses-tu d’être un monstre pour te venger de lui ?

— TU M’AS APPRIS A NE DIRE QUE LA VERITE.

— As-tu des preuves de ce que tu avances ?

Cassiopée n’eut pas le temps de répondre, car quelqu’un venait d’entrer dans la petite pièce privée des Laboratoires.

— Je suis désolée, s’excusa Mélissa Collin, étonnée d’arriver face à face avec un inconnu. Êtes-vous un nouveau technicien ?

— En fait, je suis un ancien agent de cette base qui est revenu au bercail. Je m’appelle Vincent McLeod.

— Le Vincent McLeod qui a conçu presque tous les systèmes de repérage informatique de l’ANGE ?

— Un certain nombre d’entre eux, mais pas tous…

— Je suis vraiment heureuse de faire votre connaissance, monsieur McLeod. Je suis l’agent Mélissa Collin.

Elle lui serra la main en lui offrant son plus beau sourire. Vincent se sentit pris de vertige lorsqu’elle s’approcha si près de lui qu’il en huma son parfum.

— Vous êtes réellement de retour ? se réjouit-elle.

— C’est officiel depuis ce matin.

— Me permettez-vous de rester un peu avec vous ? Je meurs d’envie de voir comment vous travaillez.

— C’est que je n’ai plus le temps de concevoir des systèmes et des logiciels, vous voyez. On m’a confié une mission fort différente.

Mélissa le regardait dans les yeux et buvait ses paroles comme s’il avait été le Messie.

— Je suis apparemment le seul être humain sur Terre à recevoir des messages divins par le biais de cette vieille Bible, poursuivit Vincent.

— Vraiment ?

— Moi qui ai travaillé toute ma vie parmi des ordinateurs, aujourd’hui, je n’ai plus tellement le temps d’y toucher.

Il y eut un terrible grincement dans les haut-parleurs qui les força à mettre leurs mains sur leurs oreilles pour ne pas se faire écorcher les tympans.

— Mais qu’est-ce que c’était ? s’alarma Mélissa lorsque le bruit prit fin.

— Un petit problème technique que je vais régler tout à l’heure, la rassura Vincent en levant les yeux vers le plafond.

— Parlez-moi de votre travail, si ce n’est pas confidentiel, évidemment.

Il lui expliqua ce qui lui était arrivé et comment l’auteur de la Bible communiquait avec lui. Mélissa exprima le vœu de voir ce phénomène de ses propres yeux, mais jusqu’à présent, il ne s’était manifesté qu’à Vincent.

— Je dois aller m’entraîner, annonça finalement la jeune femme avec regret. Puis-je vous inviter à déjeuner ce midi ? Je connais un petit restaurant très sympa non loin d’ici.

— Oui, ça me plairait beaucoup.

— Alors, à tout à l’heure !

Tandis qu’elle quittait la pièce, il remarqua qu’elle portait une jupe courte à carreaux rouges et noirs et un chemisier blanc qui lui donnaient un air d’écolière.

— Finalement, c’était une bonne décision de revenir à Montréal, se dit-il.

— SI NOUS REVENIONS A LA CONVERSATION INTERESSANTE QUE NOUS AVIONS AVANT CETTE INTERRUPTION ?

— Elle est vraiment jolie, poursuivit Vincent, fasciné par la jeune agente.

— VOUS VOULIEZ DES PREUVES DE LA NATURE REPTILIENNE DU DIRECTEUR DE LA BASE DE MONTREAL.

— Je ne peux pas aller déjeuner habillé ainsi…

— VINCENT ; JE RECLAME VOTRE ENTIERE ATTENTION !

Il sursauta et secoua la tête pour s’arracher au charme que Mélissa exerçait sur lui.

— Je suis vraiment désolé, Cass. Tu disais ?

— VOICI CE QUE VOUS M’AVEZ DEMANDE.

L’ordinateur central fit jouer sur son écran la séquence montrant l’attaque du Brasskins sur Cédric à Toronto. Vincent écarquilla les yeux en voyant son patron se métamorphoser.

— Est-ce un trucage ? s’empressa-t-il de demander.

— NON.

Les pages de la Bible se mirent à tourner brusquement, faisant tressaillir le pauvre savant déjà ébranlé. Il dut se faire violence pour observer ce qui s’y passait, car il ressentait un urgent besoin d’aller parler à Cédric. Il appuya sur le bouton du micro qui le reliait aux techniciennes d’Ottawa.

— Les alliés des enfants de Dieu seront de toutes les races et de toutes les couleurs, lut-il à voix haute une fois que les lettres se furent réorganisées. Même les Brasskins se tourneront vers vous lorsque la situation deviendra insoutenable. Le Prince des Ténèbres mettra à feu et à sang toutes les villes qui lui résisteront, mais l’homme est une créature résiliente…

Vincent s’adossa profondément sur sa chaise, essayant de comprendre ce qu’il lisait. Ces alliés pouvaient-il être des reptiliens ?

 

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